Abdalahad devise

La Terre, comme ils l'appellent, est une expérience passionnante. Je n'aurais jamais imaginé que de la matière puisse s'agencer ainsi, selon des formes aussi complexes et qui se reproduisent elles-mêmes. En regardant de près, j'ai pu constater que c'est un ingénieux système d'acides aminés organisés dans des unités très petites, qui se multiplient, et même transmettent leur code à de nouvelles versions d'elles-mêmes, à la fois semblables mais pourtant différentes. Il apparaît qu'avec le temps, des erreurs se sont glissés dans le code, changeant les formes et créant cette diversité incroyable. Qui aurait pu croire que le chaos engendre de si jolies choses ?

Si on change d'échelle, la société humaine est elle-même un organisme composé de plusieurs minuscules parties, qui ont chacune un rôle plus ou moins clair. Mes trois humains sont de mauvais exemples. Il m'est impossible de comprendre leur rôle de près ou de loin. Leur système d'apprentissage est si primitif ! Il faut dire qu'ils ne sont pas gâtés niveau communication. Ils sont si intriqués dans les vibrations froides de la matière qu'il ne m'entendent presque pas. Ils utilisent un langage qui passe par la vibration de l'air qu'ils respirent, c'est risible ! Ils apprennent aussi à fixer ce langage aérien sur des supports solides, du papier, disent-ils. De plus en plus étrange !

Les pauvres diables, cantonnés à la matière, n'ont aucune idée sur rien, ils ne savent même pas d'où émerge leur conscience.

L'ignorance, voilà ce qui m'intéresse.

Mais comment rentrer en contact avec eux ? Je leur ai un peu soufflé dessus, certes, juste assez pour qu'ils puissent sentir ma présence. Ils sont allés voir un humain responsable, mais il n'a visiblement pas pu les conseiller. (Normal, il ne me connaît pas non plus). Ensuite, ils ont été voir chacun leur géniteur (l'être humain qui a fourni la moitié de leur code), et ont eu un contact avec eux. Pourquoi ? Je l'ignore parfaitement, et ça m'intrigue au plus au point. Ce que je sais, c'est qu'il me faut discuter avec eux, qu'ils soient prêts ou non. Je vais souffler plus fort.